"Cyln" City

Sylvana & Cinamonn

◊ ◊ ◊

Près d'un an et demi ...

Un an et demi que je trainais mes panards dans des talons hauts, arpentant les divers couloirs du Mystic Swan à la recherche de ma sœur sur les dires d'un petit con qui s'était fort probablement payé ma tète.
Et je me retrouvais la ...
J'étais tatoueuse, je gagnais ma vie, j'étais heureuse et maintenant je faisais la pute et j'avais juste envie de tout foutre en l'air, je m'étais faite avoir comme une bleue par cet abruti et il devait bien se foutre de moi en ce moment. Tellement un enfoiré que j'étais à peu près sure qu'il viendrait tôt ou tard pour me louer, mais il ne l'avait pas fait sans que je sache trop pourquoi. Je n'étais peut-être pas son style et ce n'était pas plus mal ou alors il savait qu'a la minute ou son mollusque finirait dans ma bouche je le lui arracherai avec les dents ?

Je n'avais pas d'amis ici, j'étais trop méfiante pour ça. Une seule exception : Saffron. J'ignorais encore ce que je ressentais pour elle, mais chaque fois que je la revoyais, je sentais que mon "amitié" était bien différente que de prime abord. Normal sans doute, vu ce qu'il s'était passé dans la salle d'eau des Jewels, mais pour autant, pouvait-on parler de sentiments ? J'étais méfiante d'autant plus que j'avais ressenti quelque chose de spécial pour Silene et qu'elle avait disparue depuis.

Alors j'avais trouvé les meilleurs des compagnons : des amis qui ne me trahiraient pas, ne balanceraient pas mes pensées profondes ou mes idées cachées. Les meilleurs amis des humains : les chiens. De temps à autre, j'aimais flâner au chenil et nourrir rapidement les chiens avec un bout de viande ou autre. Certains pouvaient se montrer un peu agressif, mais globalement, ils devenaient rapidement plus sociable et j'avais capté vers quelle heure m'y rendre pour ne pas tomber sur les dresseurs.

Je passais ma main sur le crane d'un chien gris que j'avais surnommé "Caillou" ne connaissant pas leurs noms, j'avais bien du improviser dessus. Le pepère avait l'air d'apprécier.

— Tu vois "Caillou" j'en peux plus. Jusqu'ici j'ai tenu .... J'ai tenu pour retrouver Vicky, j'ai tenu pour Saff' ... Mais la je crois que j'ai juste envie de me tirer et de tout cramer sur mon passage.

Bien entendu, il ne comprenait pas, mais moi cela me faisait du bien de le dire à voix haute. Cela me permettait presque d'évacuer ma rage en parlant. Le chien, lui, profitait juste des caresses comme les chiens savent si bien faire.

— Je suis fatiguée ... Fatiguée de jouer les gentilles pupute obéissante ... Fatiguée de devoir côtoyer des ordures comme Beleth ou Dara. Je voudrais juste m'envoler très loin ...

Et pourtant j'allais continuer, continuer jusqu'au bout pour tenter de percer le mystère. Soit je trouvais un moyen de m'évader, soit je trouverai trace de ma frangine si elle était ici, mais je ne comptais pas baisser les bras. J'avais besoin de soutien moral, mais je ne pouvais pas en parler à Saffron, pas elle. Je refusais de lui imposer un tel poids sur les épaules, elle avait déjà bien assez de problèmes comme ça ...

Pour le moment, j'avais les chiens pour parler et j'avais tellement bien joué mon truc que je me disais que je pouvais parler aux animaux à mon aise sans risquer d'être entendue ...

Du moins le pensais-je ...

(c) oxymort

"Cyln" City

Cinnamon & Sylvana

◊ ◊ ◊

Cinnamon profitait d’un moment de calme au sein de l’hôtel. Ce n’était pas si fréquent, surtout pour elle. Entre les obligations de son service au Neon Lounge et ses fréquents clients, elle n’avait pas vraiment le temps de s’ennuyer. Cependant, cette période hivernale qui suit les fêtes de fin d’année était souvent propice à une accalmie. L’hôtel se blottissait dans une chape de neige et de froid, ce qui décourageait parfois les clients à venir se divertir. Ou alors, ceux-ci s’établissaient plus longuement au sein du Mystic Swan, cela dépendait des individus. La Jewel devait avouer qu’elle n’était pas fâchée de pouvoir souffler un peu, même brièvement, avant que les choses ne redeviennent sérieuses avec l’arrivée de la Saint Valentin, qui était toujours un moment très attendu par les clients. Et moins par les pensionnaires, cela allait sans dire.

La jeune femme avait besoin de souffler un peu, alors qu’elle avait un trou bienvenu dans son emploi du temps. Elle avait eu plusieurs clients tout récemment, et récupérer un peu n’était pas du luxe. Toutefois, elle n’avait pas envie de rester dans les dortoirs ou les espaces privés de l’hôtel. Elle avait vu assez de monde ces derniers temps, et avait vraiment besoin de pouvoir souffler un peu et avoir de l’espace personnel et de la tranquillité. Le mieux était souvent d’aller là où on ne nous attendait pas trop. Parfois, elle se glissait donc jusqu’aux écuries ou au chenil pour aller passer un peu de temps avec les animaux. L’essentiel était d’éviter d’attirer trop l’attention. En compagnie d’un Guest ou d’un Guardian, cela ne posait pas de problème, mais seule… En général, elle n’avait jamais eu d’ennuis, mais elle n’avait pas l’intention que cela commence ce jour-là.

Cinnamon avait choisi d’aller faire un tour au chenil, cette fois. Elle craignait qu’il y ait un peu trop d’agitation autour des écuries en ce moment, certains clients ayant eu l’idée d’aller faire des promenades à cheval dans la neige pour occuper leurs journées, entre une grasse matinée prenante et une nuit de débauche. La Jewel plaignait les pauvres bêtes… Certains Guests n’avaient aucun talent de cavalier, et s’y prenaient comme des manches avec brutalité. Elle n’avait jamais monté non plus, mais elle avait au moins le contact facile avec les bêtes. Elle pouvait comprendre qu’elles se trouvent incommodées. Perdue dans ses pensées, elle entendit une voix féminine qui parlait aux chiens. En général, le chenil était calme à cette heure. Les responsables ne sortaient les animaux qu’à certaines heures pour les faire se dépenser, et ils avaient des heures fixes pour les nourrir. Elle n’entendit pas tout, mais saisit au moins les dernières paroles de la femme présente, qui n’était autre qu’une Jewel qu’elle connaissait bien, Sylvana.

— Moi qui pensais être la seule à venir faire un tour ici pour trouver des oreilles compatissantes ...

Sans être intime avec l’autre jeune femme, Cinnamon la côtoyait depuis un bon moment dans l’hôtel. Elles avaient discuté, mais ne s’étaient jamais rapprochées plus que cela. Les vicissitudes de l’emploi du temps, pouvait-on dire. La jeune femme sourit à Sylvana avant de s’approcher d’un rottweiler qui avait capté sa présence et lui faisait la fête derrière les barreaux de son enclos.

— Salut, Tyson ! Comment tu vas aujourd’hui, mon gros ?

(c) oxymort

"Cyln" City

Sylvana & Cinamonn

◊ ◊ ◊

Alors que "Caillou" supportait gentiment mes jérémiades, j'entendais une voix féminine qui vint mettre fin à la conversation et me surprendre comme il se doit. Au vu de ce que je venais de dire, il serait naturel que la personne qui m'aurait entendu me jetterait en pâture à Beleth ou Cerberus pour avoir pensé que j'en avais marre, mais, fort heureusement, la demoiselle qui me faisait face n'était ni Guardian, ni Guest, ni une garce qui ferait n'importe quoi pour rentrer dans les bonnes grâce : Cinnamon, une autre Jewel qui avait fait quelques aller-retour au purgatoire.

— Putain, tu m'a fais peur !

Si quelqu'un avait entendu ce que je venais de dire cela aurait pu chauffer pour mon cul et pas d'une manière agréable.

Cin était une belle femme, probablement l'une des plus belle du MS et il y avait de la concurrence. Dara avait beau se la péter, la beauté de Cin l'éclipsait totalement selon moi, même si à mes yeux, la plus belle restait toujours la même, mais au vu de nos sentiments respectifs je ne pouvais pas être objective.

Elle se penchait donc vers le chien tout fou, largement plus qu'avec moi et le bichonnait. "Tyson" pas "Caillou" donc ... Curieusement cela me mettait un léger coup au moral.

Je me déplaçais donc aux côtés de Cin et de "Tyson" apparemment et pliais les genoux pour me mettre à la hauteur de la gueule du chien et lui fais des papouilles de l'autre côté du museau.

— Donc toi tu t'appelle Tyson ... fis-je en le caressant.

Un regard à Cinnamon me fit comprendre que je pouvais avoir confiance, suffisamment en tout cas pour savoir que, au vu de ses aller-retour au purgatoire, elle ne me balancerait pas, elle haïssait le MS au même niveau que moi.

— De temps en temps j'ai besoin d'exprimer mon ras-le-bol vis-à-vis de cet enfer et les chiens sont parfaits pour ça, ils écoutent sans jamais balancer quoi que ce soit ...

La vie ici devenait pesante et même si Saffron était l'une des rares bonnes choses que j'avais vécu ici, je ne pouvais nier que nos sentiments ambigu et l'impression de ne pas autant exister pour elle qu'elle n'existait pour moi était dur à supporter, il fallait que j'apprenne à tourner la page comme avec Silene, mais ce n'était pas si simple. Je me surprenais moi-même : à l'extérieur je n'avais jamais développé des sentiments aussi forts pour qui que ce soit, ma présence en ces lieux accroissait-elle la possibilité de sentiments amoureux me concernant ?

(c) oxymort

"Cyln" City

Cinnamon & Sylvana

◊ ◊ ◊

Cinnamon ne manqua pas de noter que son apparition avait effrayé Sylvana. Celle-ci ne devait sans doute pas s’attendre à trouver quelqu’un au chenil à cette heure. La réciproque était tout aussi vraie. La jeune femme caressa tranquillement la grosse tête du molosse, consciente que celui-ci était sans aucun doute élevé et dressé pour remettre en place les pensionnaires qui tentaient une fuite. Mais il était aussi question de protéger l’hôtel des intrus, et des clients mal intentionnés. Cinnamon espérait que le fait d’avoir fraternisé avec le rottweiler le rendrait moins enclin à s’attaquer à elle, si la situation devait se présenter un jour. Elle savait en son for intérieur que les animaux étaient moins mauvais que les humains. Ils étaient même innocents, bien loin du concept de bien ou de mal. Tout ce qu’ils voulaient, c’était faire plaisir aux humains qui s’occupaient d’eux, rien de plus. En entendant les paroles de Sylvana, la brune se tourna vers elle en haussant les sourcils.

— Si c’est pour me faire passer un message, ne t’en fais pas. Je ne dirais rien à personne.

Même s’il était question de survie en ces lieux, et qu’elle savait que sa position enviable rendait certaines de ses collègues jalouses, Cin’ n’était pas du genre à dénoncer les autres. Du moins, pas si on ne la cherchait pas auparavant. S’il était question de tirer son épingle du jeu et de se défendre, elle pouvait devenir une adversaire redoutable. Mais elle n’avait aucun problème avec Sylvana. Celle-ci n’était pas arrivée depuis si longtemps que ça dans l’hôtel, même pas deux ans, à vrai dire. Elles n’avaient jamais noué de contact prononcé, mais elles s’étaient néanmoins côtoyées. Difficile de faire autrement, au vu de leurs conditions de vie. Cinnamon continua à caresser et grattouiller le chien qui en était assurément ravi, tout en réfléchissant. Elle laissa filer un petit soupir entre ses lèvres serrées.

— Quand ça fait aussi longtemps que moi qu’on est ici, on a vite fait de faire un choix. Balancer les autres pour être dans les bonnes grâces des Guardians. Ou alors se taire parce qu’il nous reste un peu d’humanité et qu’on partage la même galère.

La jeune femme posa son regard sombre sur son interlocutrice. Elle ne voulait pas que sa présence soit source de tensions. Elle n’était venue là que pour souffler un peu. Les animaux avaient un effet apaisant sur les gens, c’était de notoriété publique. Même un molosse baveux et plein de dents avait cet effet. Elle sentait les muscles puissants de Tyson sous la fourrure, et pourtant l’animal était doux comme un agneau en cet instant. Comme souvent, il ne fallait pas se fier aux apparences, et laisser sa chance à tout le monde. Cinnamon avait rassuré Sylvana par ses paroles, mais ses pensées volèrent en direction de Dara. Certaines femmes, au sein de l’hôtel, avaient choisi leur condition, et semblaient s’en satisfaire. Elle ne condamnait pas celles qui s’y étaient rendues par nécessité, allant des ennuis financiers ou avec la justice jusqu’à un besoin de sécurité. Voire autre chose. Certains pensionnaires cherchaient un proche disparu. Mais il y en avait simplement d’autres qui y avaient vu une opportunité de se faire une vie en ayant simplement à dispenser des faveurs sexuelles. Cela, elle ne pouvait le concevoir.

— Bien entendu, il y en a quelques-unes qui sont venues de leur plein gré ...

(c) oxymort

"Cyln" City

Sylvana & Cinamonn

◊ ◊ ◊

Cinamonn avait très bien compris ce que j'avais dis et me faisait comprendre que je n'avais rien à craindre d'une éventuelle délation, précision inutile, je savais qui elle était : alors que j'étais enfermée dans un placard à balais avec une serviette pour seul vêtement, Cinamonn, elle faisait partie de ceux qui se sont révoltés lors de la mort de Tsadquiel. Aurais-je été habillée et hors du placard que je ne les aurai pas rejoins, a ce moment la, j'étais encore sure de retrouver ma soeur en vie, maintenant beaucoup moins ...

— Je sais, tu es du genre "anti-MS" toi aussi ...

Je lui fis un petit sourire, ma réputation me précédait généralement, beaucoup pensaient que j'avais tourné ma veste et que je m'étais rendue à devenir la plus "corporate" possible, mais la vérité était que je me donnais du mal pour retrouver ma sœur.

Cinamonn était une guerrière à la grande gueule et probablement une sacrée épine dans le cul de notre chère Dara nationale. La casse-couilles en chef devait probablement avoir des frissons de rage en entendant le nom de Cinamonn et pour cause, je pense pouvoir parler au nom de tous en disant que Cin n'avait rien à envie au physique de Dara, elles étaient un peu comme Blanche Neige et la reine maléfique : Dara pouvait redoubler d'effort, la plus belle du royaume serait toujours Cinamonn ...

Et ça, ça devait faire rager la reine mère ...

Les mots de Cin faisaient mouche. Je ne pouvais nier être du côté du patronnât, mais parce que j'avais mes raisons, mais comment pourrait-elle le savoir ? Je ne faisais confiance à personne, du coup personne ne connaissait les véritables raisons de ma présence ici. Qu'arriverait-il si je me confiais à Cinamonn et qu'elle décidait finalement de se metgtre dans les bonnes grâce de Dara ? Je me retrouverai face à Beleth à vitesse grand V.

Comme si cela ne m'avait pas assez désarçonnée, elle ajoutait une petite phrase sur celles qui étaient venues de leur plein gré. Devais-je y voir une pique bien placée ? Je l'ignorais, du coup, je décidais d'y répondre malgré tout.

— C'est mon cas, je ne m'en cache pas ... J'ai eu ... Des soucis financiers ...

Pieu mensonge, mon salon de tatouage se portait parfaitement bien avant tout ce potage, mais il avait fallu faire un choix pour pouvoir retrouver ma frangine. Je m'étais lancée corps et ame dans cette histoire sans réfléchir, à présent, je doutais fort que ma frangine se trouve ici.

(c) oxymort

"Cyln" City

Cinnamon & Sylvana

◊ ◊ ◊

Cinnamon avait les pensées tournées vers une certaine personne, lorsqu’elle avait parlé de celles qui étaient venues dans l’hôtel de leur plein gré. Le genre de personnes qui arrivait à tirer une fierté et un équilibre de ce qu’elles faisaient dans ce temple de la luxure et de l’esclavage. Quand elle songeait que la population était persuadée que l’esclavage était de l’histoire ancienne reléguée aux pages des livres d’Histoire et des manuels, cela avait de quoi la faire hurler de rire. Elle avait eu cette naïveté par le passé, elle aussi. Et elle en était très largement revenue. En revanche, la brune ne s’était pas attendue à ce que Sylvana prenne la remarque pour elle. Elle se traita mentalement d’idiote. Bien entendu, toutes les pensionnaires des lieux n’étaient pas ravies de leur sort même en ayant choisi d’être là. L’erreur était humaine, après tout. Il n’y avait que quelques déséquilibrées pour penser que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Cinnamon posa un regard doux sur son interlocutrice, et elle lui adressa un sourire d’excuse.

— Il y a une différence entre venir ici parce qu’on est désespérée et le faire parce qu’on se dit que ce sera un moyen facile de vivre sa vie. Les soucis financiers, je peux les entendre. Ce n’est pas moi qui vais te juger.

Ce n’était pas du tout pour cette raison qu’elle avait été envoyée ici. Ou plutôt, si, indirectement. La jeune femme avait été la victime collatérale des ennuis financiers de son père et des démêlés de celui-ci avec la mafia locale. Quand il s’était rebellé en refusant de payer, les malfrats l’avaient enlevée, elle, sur son campus à des kilomètres de là, puis l’avaient vendue au Mystic Swan à l’autre bout du pays pour compenser leurs pertes financières. Cinnamon n’avait même pas compris ce qui lui arrivait avant qu’elle ne passe ses premiers jours à l’hôtel. Et même des années après, son esprit souhaitait encore retrouver la liberté. Cette pensée lui tira une grimace amère.

— Tu sais ce qui est le plus drôle, dans cette histoire ? La seule chose qui ressemble à un but pour moi, c’est de sortir d’ici. Et pourtant, je n’ai sans doute plus aucune vie là-dehors. Ça fait plus d’une décennie que je suis enfermée ici. Ma famille doit avoir fait son deuil, mon petit ami de l’époque a sans doute trouvé une autre femme qu’il a peut-être épousée et avec qui il a possiblement des enfants. Et quand bien même je pourrais un jour sortir d’ici, je ne sais même pas comment je pourrais gagner ma vie. J’étais étudiante, à l’époque. Mis à part vendre mon corps, je ne sais strictement rien faire.

Dara n’avait pas eu tort sur ce point, quand elle était venue la narguer. Mais Cinnamon aurait préféré mourir sur place dans la minute plutôt que de lui concéder ce point. Néanmoins, elle voulait encore être libre. Une fois dehors, elle pourrait trouver une solution. Le plus paradoxal était sans doute qu’elle avait fini par trouver un équilibre dans l’hôtel, en attendant le jour où elle pourrait en sortir. Elle avait la fierté d’être désirable, d’avoir une réputation et de nombreux clients qui la voulaient pour eux. L’orgueil d’être belle et talentueuse, et de s’en contenter tous les jours pour ne pas perdre la tête. La jeune femme soupira, et regarda Sylvana avec une lueur d’honnêteté dans le regard. Elle était en veine de confessions, et outre le fait qu’elle pensait ne pas être trahie, elle savait aussi que ce qu’elle disait était connu de beaucoup, même de certains Guardians. De Dara, notamment. Autant dire que ce ne serait pas une bien grosse délation.

— Mais bon, ça ne m’empêchera pas d’essayer. Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir, pas vrai ? Et si j’arrive à sortir un jour, je pourrais au moins être libre. En galère, mais libre. Je finirais bien par trouver une solution, j’imagine, si seulement j’en arrive là.

(c) oxymort

"Cyln" City

Sylvana & Cinamonn

◊ ◊ ◊

Visiblement, je n'étais pas la cible des piques de Cinnamon, mais qui alors ? Une nana qui avait fait cela pour avoir la vie plus simple ? mais comment ? En laissant des hommes plus dégueulasses les uns que les autres nous passer sur le ventre. Quelle genre d'abrutie défoncée au plâtre pourrait ...

— Oh ... Tu parles de Dara c'est ça ?

Dara, cette petite saloperie en hauts talons qui menait la vie dure à tout le monde. Elle m'aimait bien parce que je me donnais du mal, mais son air suffisant et son égo surdimensionné me donnaient juste envie de lui mettre mon genou dans les dents et de me marrer en la voyant pleurer toutes les larmes de son corps à cause de la laideur temporaire qu'elle ne supporterait pas. La coordinatrice était fière de son physique, comment réagirait-elle avec le nez tordu ou deux fausses dents à l'avant ?

Cinnamon commençait à se confier. J'étais surprise, je ne pensais pas que mon attitude pourrait donner confiance à quelqu'un d'anti MS. J'étais du genre à me donner plutôt bien et à être appréciée par les patrons et les dirigeants. Je voyais plutôt Cinnamon m'en mettre une, mais, au contraire, elle commençait à me raconter son histoire et quelle triste histoire : en couple, avec des parents aimant et toute cette vie perdue pour des histoires d'argent.

— Si on sort d'ici je peux t'apprendre à tatouer, ça me soulagerais de beaucoup de boulot dis-je avec un petit rire.

Le plus drôle c'est que j'étais à moitié sérieuse, avant que je parte, j'avais les moyens de tenir le salon, il avait fallu que je bidouille le truc pour être acceptée au MS.
Ce fut à cet instant que je réalisais ma bourde : si j'étais débordée de boulot comment avais-je pu être autant dans la merde financièrement pour me retrouver ici, il fallait que je rattrape le coup.

— Enfin si je peux relancer le salon bien sur ...

Pas sure que ça marche évidemment ... Oh et puis zut ...

— En vérité je n'avais pas de problèmes financiers ...

Je parlais tout en me penchant vers le chien en lui caressant la tète, plongeant mon regard par dessus le sien. J'avais lu quelque part qu'il ne fallait jamais regarder un chien droit dans les yeux, c'était probablement n'importe quoi, mais ça m'avait tellement marqué que j'évitais.

— J'ai envoyé péter mon affaire florissante pour retrouver ma petite sœur. J'avais de bonnes raisons de penser qu'elle était ici, alors je n'ai pas réfléchis, mais ça fait plus d'un an que je suis la et je n'ai trouvé aucune trace d'elle.

Je levais le regard vers le toit du chenil avant de reporter mes yeux dans ceux de la jolie Jewel.

— Depuis que je suis venue ici ça a été une successions d'emmerdes et je n'ai pas trouvé trace d'elle, si bien que je me dit que tout ça était un tuyau crevé et que ma frangine est peut-être morte quelque part ...

(c) oxymort

"Cyln" City

Cinnamon & Sylvana

◊ ◊ ◊

Cinnamon ne fit pas de commentaire à la question de Sylvana. Et pour cause, sa collègue trouva la réponse toute seule. Elle parlait effectivement bien de Dara, qui était à n’en pas douter une personne qu’il était difficile d’apprécier quand on était une Jewel. Dans le fond, la brune en était arrivée à se demander si la coordinatrice ne souffrait pas d’un complexe d’infériorité, pour vouloir toujours faire remarquer à quel point elle était la meilleure, la plus belle, la plus merveilleuse. On aurait dit une parodie de la méchante reine de Blanche Neige, avec son miroir qui la complimentait à la demande. Aucun doute qu’un tel objet aurait eu du succès auprès de Dara… Si ce n’est qu’en lieu et place du charisme de la méchante reine, on avait droit à une sorte de petit roquet hargneux avec des airs de princesse…

Sylvana lui proposa de l’embaucher en tant que tatoueuse si un jour elles sortaient de là et si elle parvenait à relancer son salon. Cinnamon inclina légèrement la tête, un petit sourire aux lèvres, et laissa ses doigts courir sur le bras de sa collègue dans un geste reconnaissant. La brune ne pensait pas avoir les talents requis en matière de dessin pour faire une tatoueuse convenable, mais elle appréciait les efforts que Sylvana faisait pour la mettre à l’aise et lui apporter du réconfort. Toutes les deux savaient que jusqu’à nouvel ordre, elles étaient condamnées à rester au Mystic Swan jusqu’à ce que quelqu’un décide de leur sort. Ce qui adviendrait sans doute le jour où elles ne rapporteraient plus suffisamment, une fois que leur beauté se serait fanée.

Cin’ fut surprise d’entendre Sylvana lui avouer qu’elle avait intégré l’hôtel de son plein gré, mais les raisons étaient plus que louables. Elle avait voulu retrouver sa petite sœur, et finalement s’était retrouvée bredouille. La brune eut une légère grimace. L’acte était noble, mais Sylvana s’était ainsi retrouvée coincée en ces lieux. Il y avait toutefois un seul point positif dans toute cette affaire.

— C’est peut-être une bonne chose pour elle, alors. Si elle a réussi à échapper à cette vie …

La jeune femme haussa doucement les épaules avant d’englober la pièce qui les entourait d’un geste vague. C’était au moins quelque chose de positif, de pouvoir se rassurer en se disant que ceux que l’on aimait étaient peut-être quelque part, en sécurité. C’était du moins tout ce qu’elle pouvait espérer. Concernant sa propre famille, Cinnamon espérait sincèrement que son père avait pu échapper aux truands qui le rançonnaient. Ce qui lui serrait le cœur, c’était que ses parents, ses proches pensaient sans doute qu’elle était morte, depuis le temps. Plus personne ne la recherchait en dehors de ces murs, sans doute. Ce qui était un peu comme mourir, tout compte fait. La brune se secoua intérieurement, refusant de se laisser aller à la mélancolie.

— Est-ce que tu sais si elle est seulement passée par ici à un moment ? Ou vraiment rien ?

Lorsque l’on vivait dans un lieu clos comme le Mystic Swan, une prison qui devenait votre unique univers, le moindre petit quelque chose capable d’éveiller votre intérêt devenait précieux. Même s’il s’agissait de mener une enquête perdue d’avance. Même s’il n’y avait pas vraiment d’espoir pour tout cela. Après tout, qu’est-ce que cela leur coûtait d’essayer ? De se questionner ? Cinnamon était même prête à mettre du sien, à donner de sa personne. Elle ne pensait pas que quelqu’un puisse se cacher si longtemps dans l’hôtel, mais parfois il pouvait y avoir des surprises. La jeune femme poussa un soupir en se laissant aller en arrière, en appui sur ses bras, les paumes posées à plat derrière ses fesses.

— Ici, on a l’impression d’être dans un monde parallèle. Parfois, je me dis que le pays pourrait s’écrouler et la Terre arrêter de tourner, qu’on ne s’en rendrait même pas compte. Seigneur, je n’ai même aucune idée de qui est le Président actuel !

(c) oxymort

"Cyln" City

Sylvana & Cinamonn

◊ ◊ ◊

Cinnamon avait raison sur un point : si Vicky avait échappé à cette vie c'était tant mieux pour elle, mais j'ignorais ou elle était et cela me rendait folle d'inquiétude. Après tout, elle pouvait être en bonne santé et heureuse comme en train de crever dans un coin de trottoir, une seringue dans le bras et vu l'état dans lequel elle était la dernière fois que je l'avais vue, je doutais fort qu'elle soit heureuse dans une petite cabane dans un coin de pêche.
Je baissais les yeux vers l'un des chiens comme concentrée sur sa petite truffe remuante et ses petits halètements agréables.

— Je voudrais juste savoir qu'elle va bien ...

Les chiens étaient calmes et l'ambiance était chaleureuse. Cela invitait à ma confession. Cinnamon était comme moi : anti MS, je ne la connaissais pas, mais j'avais la sensation de pouvoir lui faire confiance. Elle avait été l'un des fer de lance de la révolution du MS à la mort de Tsadquiel, elle n 'était surement pas dans les petits papiers de la directrice et encore moins ceux de Dara qui semblait voir le MS comme une putain de religion ...

Est-ce que Vicky était passée par ici ? Aucune idée. J'avais cru la voir lors des émeutes dans un uniforme de surveillante, mais le bordel était tel que je n'étais pas sure et je ne l'avais plus jamais revue. Il y avait des femmes parmi les surveillantes, j'avais pu confondre après tout.

— Je l'ignore ... Si c'est le cas, elle est probablement morte ...

Et brulée, car j'imagine que quand ce genre de choses arrive, ils font disparaître les choses au plus vite et de la manière la plus efficace possible, que ce soit en faisant bruler la dépouille ou en la dissolvant dans l'acide. Un petit espoir pouvait subsister si le MS avait son propre cimetière que ça soit entre les murs ou en dehors.

Dehors ... J'ignorais si je reverrai cela un jour. La seule manière aurait été de devenir guardian, ce sont les seuls à avoir un accès privilégié à l'extérieur. Devais-je continuer à jouer les bonnes élèves ? En tout cas cela ne coutait rien de le faire jusqu'à ce qu'une autre révolution éclate.

— Aucune idée non plus, mais j'espère un jour pouvoir revoir l'extérieur. Pour ça il faudrait une nouvelle révolution, mais je pense que ce n'est pas prêt d'arriver, Verascyel est vue comme une directrice plus cool que Tsadquiel, les gens ont moins envie de se révolter, ceux qui ont connu l'avant verascyel du moins ...

Et pourtant, je l'espérais, cet endroit était une horreur, s'il fallait partir ce serait à cet instant.

(c) oxymort

"Cyln" City

Cinnamon & Sylvana

◊ ◊ ◊

Cinnamon n’espérait pas que la sœur de Sylvana se trouve encore au sein de l’hôtel. Elle ne souhaitait cela à personne. Peut-être que certains Guests s’imaginaient que la vie ici n’était pas si terrible, que les résidents vivaient dans le luxe et qu’ils en tiraient une certaine satisfaction. Mais en réalité, tout cela n’était que de l’esclavage moderne, une traite sexuelle visant à soutirer des sommes folles à de riches clients. Le vernis de luxe et de beauté de l’établissement, c’était de la poudre aux yeux, un enchantement pour les visiteurs. Les résidents voyaient l’envers du décor et goûtaient à toute la violence dont cet univers était capable. La jeune femme avait suffisamment séjourné au Purgatoire pour en savoir quelque chose. A la mention de Verascyel, elle secoua doucement la tête.

— Une directrice plus cool, certes, mais ça ne veut pas dire qu’elle sera notre ange gardien pour autant. Elle reste notre geôlière, et à moins de réussir à envoûter un Guest qui accepte de payer pour nous libérer, je crois qu’on devra accepter de se battre pour notre liberté.

La Jewel devait avouer que les sévices étaient légèrement moins intenses depuis que la nouvelle directrice avait pris les commandes, mais cet endroit restait une prison où des crimes contre l’humanité étaient commis. Elle savait que jamais rien ne pourrait la convaincre de cesser de se battre, d’accepter sa condition. Elle voulait retrouver sa liberté, et si elle se résignait, elle craignait de finir par dépérir aussi sûrement qu’une fleur privée de soleil. Verascyel n’était pas leur bienfaitrice, elle était simplement une nouvelle personne avide de fortune, qui avait senti le vent tourner dans la bonne direction lors des émeutes. Cinnamon avait eu beaucoup à perdre durant la révolte, et cela n’avait pas été sans conséquences pour elle, mais elle le referait sans hésiter si c’était à refaire.

— Je ne sais pas ce qui est arrivé à ta sœur, mais j’espère qu’elle n’est pas ici, et que tu la retrouveras une fois dehors. Parce que, après tout, on ne peut pas se résigner et juste baisser les bras, tu ne crois pas ?

La jeune femme était hautement consciente du fait que leur vie ne tenait qu’à un fil, en ces lieux. Que deviendraient-elles quand elles seraient trop âgées pour intéresser les clients ? Quand leur beauté se serait fanée ? Qu’arrivait-il aux résidents qui atteignaient leur « date de péremption » ? Assurément, Cinnamon ne voyait pas l’hôtel leur offrir une retraite bien méritée dans un bel endroit. Elle soupçonnait donc un sort plus que sordide qui les attendait tous, sauf bien entendu s’ils parvenaient à retrouver leur liberté. Elle y travaillait, comptant sur un Guest pour peut-être l’y aider, quitte à ce qu’elle lui fausse compagnie une fois dehors. Même si plus rien ne l’attendait dehors, elle pourrait au moins essayer de se construire une vie, d’une façon ou d’une autre. La liberté resterait toujours son but, même si elle donnait désormais parfaitement l’illusion de s’être rangée et de tenir le rôle qu’on lui avait assigné.

— Je crois que le pire dans tout ça, c’est que j’ai réussi à composer avec cet endroit pour ne pas perdre la tête. Ca fait douze ans que je suis prisonnière de l’hôtel, et j’ai fini par tirer un certain orgueil et une certaine satisfaction de mes réussites et de ma réputation. Alors que la seule chose que je souhaite, c’est sortir d’ici et voir cet endroit brûler ...

(c) oxymort

"Cyln" City

Sylvana & Cinnamon

◊ ◊ ◊

Hélas, Cinnamon pensait comme moi : aussi agréable soit la nouvelle directrice, elle n'était pas notre alliée et ne le serait jamais. Un guest prêt à payer pour moi ? Ca aurait pu être Silene, mais hélas, elle devait probablement être mariée maintenant et les choses n'iraient pas mieux pour moi, à moins d'avoir de la chance. La vie n'était pas finie, mais s'il eut été si simple de quitter l'hôtel, il n'y aurait presque plus d'employés ici. J'imaginais que les démarches pour être achetée devaient être bien plus complexes que Cin et moi pouvions l'imaginer.

— Si seulement c'était si simple ...

Cinnamon avait raison cependant : nous ne pouvions pas juste baisser les bras. J'étais entrée ici dans le but de retrouver ma sœur, maintenant j'avais un autre but : la fuite, réussir à quitter les lieux et sauver mon cul de cette situation de merde. Je ne pouvais pas passer ma vie à passer sous le ventre de tous les clients du MS, il fallait que je trouve une solution pour m'enfuir une fois pour toute et si les autres pouvaient m'accompagner ce serait parfait, mais il valait mieux ne pas rêver.

Cinnamon continuait, m'expliquant retrouver une forme de fierté dans sa manière de faire et en voyant son succès, je ne pouvais le nier : être dans les petits papiers des clients et de mes supérieurs me rendait curieusement fière de moi, même si j'aurai préféré être dans mon salon de tatouage à des milliers de kilomètres de la. Si je réussissais à sortir, je savais très bien que je pourrai pas rouvrir mon salon, je devrais déménager et ouvrir ailleurs.

— Il y a une question que je me pose ...

Et c'était une question plutôt légitime. Après tout, nous savions ce qui arrivait aux Jewels qui ne rapportaient plus assez ou aux swan incapable de pratiquer leur art.

— Qu'arrive-t-il aux employés devenu trop vieux ?

Je doutais fort qu'ils les libèrent ou même qu'ils les abattent, pour autant je n'en n'avais pas vraiment croisé, personne au dessus de cinquante ans du moins ...

(c) oxymort